Rédaction : le sens des mots

Le français est une langue merveilleuse. Mais attention à bien la maîtriser pour se faire comprendre. Pour cela, il n’y a pas de mystère, il s’agit, entre autres, de connaître la bonne définition du vocabulaire employé.
MEMEARNOLD

EXEMPLE
La Tribune publiait en juillet 2015 un article intitulé :
le digital n’épargnera personne !

(Les twittos surfeurs observeront d’ailleurs que la phrase utilisée dans la balise meta pour le SEO, contient, à la place, le terme « numérique ».)

Mais ici, c’est le verbe « épargner » qui questionne.

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Il y a contenu et contenu !

Après avoir tenté une définition du contenu il y a trois ans (déjà !), penchons-nous à nouveau sur les aspects principaux de ce fameux mot devenu magique et utilisé à tout bout de champ : le « contenu »

Deux aspects caractérisent cette notion

1. Le contenu en tant qu’élément : par exemple un texte, une image, une vidéo, un tableau, un titre, une infographie, etc.

Et en sous-éléments (comme l’idée de poupées russes qu’il m’est arrivé d’évoquer auparavant) : la nature par exemple d’un texte : article classique, brève, histoire, publicité…

Le choix de ces « supports » varie selon les objectifs du message que l’on veut partager : newsletter, email, vidéo, blog, le tout transmis de manière adaptée selon les outils-supports (ordinateur, tablette, smartphone…).

Tout cela représente la forme.

Tout comme le style du message transmis : sur un ton pédagogique, humoristique, alarmant, sérieux…

2. Mais l’idée de contenu, c’est aussi ce qui est dit : le fond. Si possible un fond qui a du sens. La première chose à laquelle je pense quand on me parle de « contenu » est non pas sous quelle forme (vidéo, texte, son, etc.), mais bel et bien ce que l’on va DIRE. Le propos servi par des mots cohérents qui vont signifier une information, une idée, une réflexion. Le sens profond du contenu, est à mes yeux, la valeur intrinsèque de ce qui se partage, quelle que soit la forme sous laquelle le message est transmis.

Or, c’est très souvent que ces deux aspects sont mélangés, ou plutôt confondus, et encore plus souvent que l’on parle de contenu dans son premier aspect. Comme si ce que l’on dit n’avait pas d’importance, on remplit parce que « allez, il faut du contenu, il faut remplir à tout prix, on va mettre une vidéo, un titre, une image, les gens adorent ça… ».

Le danger est que l’on occulte la force du message lui-même, son intérêt profond, sa qualité, ce qui fait sa valeur, non pas en termes de buzz ou de clics, mais en termes de signification, de sens du propos.

En effet, quid de ce qui est exactement dit ?  Si l’on produit du contenu pour du contenu, il est fort probable que la majorité de celui-ci contient du vent, de l’éphémère, improductif.

Car tout de même, l’intérêt d’une bonne communication n’est-il pas de transmettre un message qui serve réellement à quelque chose ?

Économiser de l’argent ou gagner de l’argent ?

ID-100144092Qu’est-ce qu’une formule juste ?
C’est une formule qui dit bien ce qu’elle veut dire, qui utilise donc les bons mots.

Or, force est de constater que dans ce flux gigantesque et continu d’information, ce n’est pas toujours le cas. C’est même l’ère de la sémantique chaotique.

Voici un exemple récent de titre rédigé avec une tournure de phrase dont le sens n’a pas de sens (sic).


« Économiser de l’argent » n’a pas le même sens que « gagner de l’argent »

Ce week-end, est sortie une info fort sympathique selon laquelle un adolescent de 14 ans a découvert que certaines polices de caractères imprimées demandaient moins d’encre, ce que tout bon graphiste print sait déjà.

MAIS le titre formulé par Slate.fr et relayé un peu partout, est trompeur :
« Le gouvernement américain pourrait gagner des fortunes en changeant de police de caractères« .
Le verbe juste est « économiser ».
Faire gagner, non ! Faire économiser, oui !

On a pu lire également : « Le changement de police d’écriture peut rapporter des millions« .
Ce qui est donc totalement faux. Pas de dollars en plus (à moins de faire marcher la planche à billets), mais des économies, ça oui. Et pas qu’un peu.

Cette idée de choisir des polices moins buveuses d’encre, est tellement évidente qu’elle devrait d’ailleurs être largement appliquée depuis longtemps dans le cadre de la consommation de cartouches.

Beaucoup d’autres sites Web ont relayé cette info sans sourciller, sans se poser la question. En tant que rédactrice Web, je suis avant tout soucieuse du bon français.

Je fais partie de ceux qui pensent et soutiennent mordicus que ce n’est pas parce qu’un hypothétique référencement pousse à faire une fixette sur les algorithmes et les mots-clés, qu’il faut en oublier sa langue.

Seuls, quelques sites ont réussi à se démarquer correctement en titrant par exemple :
« … la police de caractères pourrait réduire les coûts d’impression« . L’idée de réduire les coûts est bien meilleure dans ce contexte. Et surtout plus logique !

La presse, quant à elle, a en général évité de tomber dans le panneau (L’ExpressLe Point, etc.).

économie ≠ gain

En plus, au départ, « économiser » veut dire, épargner, mettre de côté.
Quand on économise, on ne gagne pas plus, c’est simplement que l’on dépense moins…
« Gagner » (ici, gagner de l’argent) veut dire faire un profit financier.

Note : le verbe économiser n’est même pas forcément le plus juste, dans la mesure où ce coût abaissé des dépenses en impression, sera probablement réinjecté, dépensé sur un autre poste.

Il est simplement question de bon sens dans la gestion financière d’un budget. Mais l’économie au sens de mettre de côté n’a pas lieu d’être, aux États-Unis comme dans les autres pays, tous, rappelons-le, étant aux prises avec une dette colossale.

Et si je continue dans la même logique : on ne peut mettre de côté de l’argent qu’on n’a pas…
C’est hélas de plus en plus souvent que l’on peut voir passer ce genre de titre, ou le verbe gagner est mal utilisé, en lieu et place de la réalité et du sens, c’est-à-dire du verbe économiser !

Cela se rencontre principalement dans le champ marketing évidemment. Telle publicité vous informe d’une « promotion qui va vous faire gagner de l’argent »…

À longueur de journée, sur les ondes radio ou sur les publicités en ligne, on nous sert le même discours. Est-ce parce que l’idée de « gagner » fait davantage rêver que l’idée d' »économie » ?

Pour être logique, il suffit de réfléchir un peu

Même chose avec « gagner du pouvoir d’achat« . Si l’on se penche sur la formule, elle est totalement idiote, vous en conviendrez. En ne dépensant pas, nous économisons, c’est sûr ; mais en aucun cas cela fait rentrer de l’argent… Nous n’en perdons pas, mais nous n’en gagnons pas non plus.

Les soldes sont les championnes pour vous faire croire que vous allez gagner de l’argent  – sur votre fameux pouvoir d’achat – en achetant un pull à 10 euros plutôt à qu’à 40. Certes, vous faites (peut-être) une affaire sur le moment, dans le cas où vous aviez vraiment besoin d’acheter un pull. Mais vous ne gonflez absolument pas votre pouvoir d’achat !…

Le mieux est de ne pas dépenser du tout (le superflu, entendons-nous). On peut parler alors de véritable économie. 😉

Cet exemple permet de rappeler la subtilité du français. Les mots ont tous un sens. Mal utilisés dans une phrase (le plus souvent dans un article de presse d’ailleurs), ils peuvent vouloir dire n’importe quoi, voire son contraire…